bdi transitions agence roquette
Article

Agences Roquette et Les Raisonné.e.s : vers une communication responsable et engagée10 min de lecture

  • communication
  • écoconception
  • transitions

En matière de communication, mettre en avant les engagements de sa marque ou la politique de Responsabilité Sociétale de son Entreprise (RSE) ne suffit plus. Deux agences bretonnes l’ont bien compris et accompagnent diverses structures dans la transmission de leurs messages de manière plus éthique et responsable. Installée à Rennes depuis 2020, l’agence Les Raisonné.e.s cherche à utiliser les leviers de la communication et de la créativité au service de l’émergence d’une société plus vertueuse. Spécialiste en communication responsable et RSE, elle a ainsi accompagné plus de 40 projets vertueux. Près de Quimper, Roquette est spécialisée dans l’écoconception de sites Internet. Amandine Garnier, fondatrice et directrice conseil des Raisonné.e.s, et Audrey Païno, cofondatrice de Roquette, reviennent sur leurs démarches respectives.

 

Deux agences nées d’une volonté de changement

Créer de nouveaux récits et rendre désirables des projets porteurs de changements : voilà ce qui a amené Amandine Garnier et Hélène Hubert à créer l’agence de communication responsable Les Raisonné.e.s en 2020. « Avec Hélène, nous nous sommes connues pendant nos études. Nous avons ensuite eu des parcours différents : elle en tant que conceptrice-rédactrice pour des gros comptes en agence de publicité sur Paris, et moi dans le milieu associatif pour le Low Tech Lab à Concarneau. Le hasard de la vie nous a réunies à Rennes, retrace Amandine Garnier. Je souhaitais appliquer les principes du low tech (utile, accessible et durable) à la communication. Je remettais en question ma posture professionnelle, ma “responsabilité professionnelle sociétale” en quelque sorte. Hélène avait davantage envie de travailler pour des messages, des personnes et des organisations qui font bouger les choses dans le bon sens. »

« Nos recherches nous ont permis de constater que les choses avaient évolué, notamment depuis le Grenelle de l’Environnement en 2007. Des groupements associatifs et des consortiums d’acteurs étaient nés, des manifestes avaient été produits par certains professionnels de la communication. L’ADEME avait également publié une première version de son Guide de la communication responsable. La création de l’agence nous a semblé logique. La même année, la Covid a relancé ce mouvement vers une communication plus responsable, avec notamment les questions du monde d’après et des imaginaires », souligne Amandine Garnier.

L’agence web Roquette est née après l’arrivée de ses fondateurs, Audrey Païno et Raphaël Boutin, en Bretagne. « Une fois installés à Plonéour-Lanvern, près de Quimper, nous souhaitions allier davantage nos convictions à ce que nous produisions. En 2020, peu d’agences partageaient ces valeurs écologiques et sociétales, mais les prémices d’une évolution du web se faisaient sentir, relate Audrey Païno. Nous défendons une approche plus durable dans le numérique. Pour nous, l’écoconception est liée à la qualité du support, mais surtout à la volonté de se remettre en question. Partant de cette évidence, nous avons lancé Roquette pendant le confinement. » Depuis, un développeur et une webdesigner UX/UI sont venus compléter l’équipe.

 

les raisonne-e-es
L’équipe des Raisonné·e·s.

 

Les 5 piliers d’une communication responsable

Amandine Garnier distingue communication responsable et communication RSE, consistant à pousser des messages liés aux différentes actions menées dans le cadre d’une politique RSE. « Sur les questions de communication responsable, c’est davantage la posture du communicant qui prime. Pour tendre vers cette communication durable, le B.A.-BA passe par l’écoconception des supports pour réduire l’empreinte environnementale. La déontologie constitue le deuxième pilier de notre approche : travailler la justesse du message et éviter les maladresses (green-washing, social-washing…) ne s’improvise pas. De nouvelles législations font évoluer les choses, mais cela reste encore méconnu dans le secteur de la communication. Le troisième pilier concerne plutôt les questions sociales et sociétales, avec notamment les notions d’accessibilité et d’inclusivité. L’objectif est de respecter les individualités, les spécificités et les sensibilités de tous. Le quatrième axe porte sur les imaginaires. Nous cherchons à montrer les trajectoires sensées et vertueuses auxquelles nous croyons. Mais comment embarquer et créer de la désirabilité ? Enfin, le dernier pilier s’intéresse à l’implication des parties prenantes, pour revenir à la base de la communication, c’est-à-dire le dialogue. »

L’équipe des six spécialistes qui composent Les Raisonné.e.s respectent ces piliers dans chacune de leurs interventions, qu’elles concernent le branding et la stratégie, la création de contenus, d’identité de marque, ou de sites Internet.

 

L’écoconception de sites internet envisagée comme démarche globale

Dès la création de leur agence, Audrey Païno et Raphaël Boutin souhaitaient dépasser l’image de « vieux dinosaures de la communication » qu’ils avaient connue précédemment dans leur vie professionnelle. « Nous aimons réfléchir au travail qu’on réalise, nous remettre en question et apprendre constamment. En plus de la partie technique de création d’un site écoresponsable, la transparence, l’écoute et la coopération priment dans la relation avec nos clients. Nous souhaitions nous montrer plus flexible et souple face à leurs demandes, leur proposer une alternative plus artisanale, tout en ayant un process très carré et efficace. »

Roquette utilise d’ailleurs davantage le terme d’“éco-socio-conception” pour évoquer ses réalisations. « L’éco-conception consiste à concevoir et à développer un site de manière globale. Nous incluons un volet social non négligeable dans notre démarche. L’objectif est de prévoir le maximum de choses en amont, en faisant des choix. Le premier d’entre eux est celui de créer ou non un site d’ailleurs ! Nos échanges avec nos clients nous permettent de mieux les orienter et les accompagner dans ces choix stratégiques qui vont impacter le cycle de vie du site finalisé. Pour compléter cette faisabilité technique, notre cahier des charges intègre des paramètres sociaux. Les notions d’accessibilité (graphisme, contenu, navigation) et de sécurité prennent de plus en plus d’importance », précise Audrey Païno.

« L’écoconception web est aussi en proie au green-washing malheureusement. Déclarer qu’un site est « écoconçu » ou « accessible » uniquement car il obtient une bonne note à un audit ou utilise des outils de surcouche, ne suffit pas. Ce genre d’outils est d’ailleurs plutôt déconseillé par la Commission européenne ou les associations spécialisées. Le manque d’information autour de ces notions et l’absence de certification nécessitent de les démystifier régulièrement. Chez Roquette, nous nous calons sur les référentiels gouvernementaux et nous revendiquons notre certification Opquast, qui garantit des règles d’assurance qualité web. »

 

Sensibiliser sans culpabiliser

En produisant des sites plus légers et rapides à charger, Roquette contribue à réduire l’empreinte environnementale de la communication mais travaille davantage sur la prise de conscience de ses clients. « Nous-mêmes, nous ne sommes pas parfaits ! Il y a toujours une marge d’amélioration et nous ne sommes pas dans la culpabilisation. Cette remise en question doit être constante mais chacun agit selon sa temporalité et sa maturité. »

Même constat pour Amandine Garnier : « Nous ne cherchons pas à travailler qu’avec des gens parfaits, mais nous défendons nos convictions. Nous n’avons rien inventé, il existe des outils et des pratiques. Donc discutons et avançons ensemble pour appliquer une communication cohérente, en fonction de votre avancée et du process en cours au sein de votre organisation. Selon nous, nous avons un autre rôle à jouer que celui de travailler uniquement sur les outils. Il ne s’agit pas seulement de parler de papier recyclé, comme on l’entend souvent dans nos formations. Nous jouons un véritable rôle de transformateur. Notre approche nous amène à changer notre manière de réfléchir et à ne pas appliquer les automatismes de la communication traditionnelle. Il faut changer les indicateurs de réussite, et se poser la question de comment va être perçu le message par les parties prenantes. »

 

Les deux agences l’ont bien compris et ont chacune mis en place des outils de sensibilisation. Roquette réalise par exemple des ateliers découverte de l’écoconception auprès de l’espace coworking La Cantine ou de la pépinière d’entreprises Quimper Bretagne Occidentale. L’agence a également collaboré avec la marque Bretagne. « Grâce à l’outil gratuit Web Karbon que nous avons créé, nous proposons des audits de site, testons les performances techniques et l’impact environnemental des sites des participants. Lors de notre restitution, nous sensibilisons à toutes ces questions : Pourquoi est-ce important d’avoir un site léger ? Comment améliorer les performances ? Même si les changements ne s’opèrent pas immédiatement, nous introduisons l’idée que la prochaine refonte sera faite dans le cadre de l’éco-conception. »

Depuis peu, l’agence met aussi en place des ateliers de coconstruction de sites web avec ses clients. « À partir d’un jeu de cartes centré sur l’expérience utilisateur créé en interne, nous proposons de coconstruire leur page d’accueil. L’objectif est de mieux comprendre la place de chaque élément, les notions d’accessibilité et de navigation. Ces ateliers constituent bien souvent de bons prétextes à l’émergence de questionnements et de discussions. Une autre façon de sensibiliser est de faire figurer des déclarations d’écoconception sur les sites de certains de nos clients. Une fois finalisé, nous réalisons pour cela un autodiagnostic du site basé sur le Référentiel Général d’Écoconception des Services Numériques (RGESN). Cela permet à nos clients d’afficher leur engagement, mais aussi d’informer et de sensibiliser les visiteurs des sites. »

 

Faire évoluer les professionnels de la communication

En plus des formations en entreprises et des ressources qu’elles proposent, Les Raisonné.e.s cherchent également à faire évoluer les pratiques des professionnels de la communication. L’atelier Recto/Verso s’adresse ainsi aux étudiants ou aux communicants en poste pour justement reprendre de la hauteur. « Nous revenons sur les enjeux globaux qui permettent de justifier des choix concrets dans la pratique des communicants, comme le choix de couleurs dans une charte graphique par exemple pour des raisons d’accessibilité. Comme une Fresque du Climat, l’idée de cet atelier est de dresser un panorama du secteur. Nous sommes partis des ressources exploitées par les professionnels, qu’elles soient matérielles ou immatérielles (données, cerveaux, codes culturels…). Cela permet de se reconnecter à son terrain de jeu tout simplement. Nous questionnons ensuite sur les écueils puis la chaîne d’impacts potentiels sur l’entreprise, la société, les individus et sur l’environnement. L’idée n’est pas de culpabiliser individuellement mais de rendre visible les écueils des communicants de manière cumulée. Pour envisager des solutions, nous revenons sur les piliers de la communication responsable, qui peuvent annuler les chaînes d’impacts définies précédemment. Cela amène les participants à échanger sur leurs pratiques, déjà mises en œuvre, ou à les faire évoluer. Ils repartent avec une feuille de route et identifient les leviers à travailler pour leur structure précisément. »

Au même titre, Audrey Païno intervient auprès des étudiants en graphisme du Lycée Le Paraclet de Quimper pour lier écoconception et design. « C’est un vrai challenge pour nous de parler de ce sujet à des jeunes formés au e-commerce et au développement d’entreprises à l’EMBA Business School ! Cela peut paraître antinomique, mais il est possible de faire évoluer les choses de manière un peu plus responsable. Dans le Finistère Sud, nous sommes un peu les pionniers sur cette notion d’écoconception. Nous tenons bon et nous ne lâcherons pas ! Le travail de tous les acteurs de la communication responsable finit par porter ces fruits, que ce soit les agences de communication, les référents RSE en entreprise… Chaque personne est utile et fait évoluer la société. »