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Success story

L’emploi partagé comme marque employeur au sein de Cornoualia9 min de lecture

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Directrice de Cornoualia depuis sa création en 2000, Maryse Le Maux est avant tout passionnée par son métier. Fondatrice de ce groupement d’employeurs sur la Cornouaille, elle contribue à faire connaître et reconnaître le travail à temps partagé. Loin de s’arrêter en si bon chemin, ce laboratoire d’expériences breton a vu naître d’autres initiatives, comme la crèche Tôt ou Tard, un atelier école à temps partagé ou encore plus récemment une école de maintenance. Le point commun entre tous ces projets ? Allier marque employeur et atouts territoriaux pour se différencier et attirer des actifs, face à un marché du travail tendu. 

 

Comment a évolué le groupement d’employeurs Cornoualia depuis sa création il y a 24 ans maintenant ?

Cornoualia a été créé à Quimper le 1ᵉʳ janvier 2000, à l’initiative de 8 industriels locaux (Le Moulin de la Marche, Bonduelle, Ouest Automobile, Guyader, Quick, Armoric, Capitaine Cook, Relais Mercure). Tous rencontraient la même problématique de ressources humaines liée à la saisonnalité de leur activité. Ces entreprises intégraient chaque année de nombreuses personnes pour renforcer les effectifs durant les pics de production, pour devoir s’en séparer à la fin de la saison, faute de besoins et de moyens. En discutant entre eux, ils se sont rendu compte que d’autres dirigeants avaient le même problème sur des périodes complémentaires. Alors pourquoi ne pas créer une entreprise pour mutualiser des compétences et apporter un vrai statut social à ces personnes qui enchaînent les saisons ?

En 24 ans, Cornoualia a créé un peu plus de 900 emplois, et 306 entreprises clientes nous font confiance à l’heure actuelle. Ces compétences saisonnières ne représentent plus que 45% de nos effectifs. Nous sommes très présents désormais sur les compétences supports : administratif, communication, ressources humaines, informatique, qualité et sécurité, environnement… Celles-ci répondent bien aux besoins des TPE et PME, majoritaires sur le territoire de la Cornouaille. Plus de 50% de nos clients comptent moins de 20% salariés. L’enjeu est clair : pour rester compétitifs, ils ont souvent besoin de compétences, mais n’ont pas les moyens de se les offrir à temps plein. L’idée est donc de partager ces postes avec d’autres entreprises, ce qui permet à Cornoualia de proposer des CDI à temps plein.

Cela montre bien que le partage de compétences, ça marche ! Certes, ce n’est pas une panacée, mais c’est un moyen pour des demandeurs d’emploi de trouver du travail sur le territoire d’une part, et d’autre part, pour les entreprises locales, de trouver la bonne compétence, le temps dont elles ont besoin, voire de faire venir des talents de l’extérieur.

 

Cornoualia, 900 emplois créés en 24 années d’existence

Observez-vous une volonté de travailler différemment chez les personnes qui postulent au groupement ?

Je me rends compte que certains salariés ont postulé chez nous car nous avions l’offre, tout simplement, sans savoir ce qu’était réellement le temps partagé. Des années après, ils me disent qu’ils ne changeraient pour rien au monde leur façon de travailler. A contrario, d’autres salariés sont venus pour le temps partagé, et nous quittent dès qu’ils ont l’occasion d’intégrer une entreprise à temps plein. Une chose est sûre : le fait de multiplier les expériences en temps partagé leur permet de développer leurs compétences à vitesse grand V. C’est un véritable booster de carrière et certains font valoir cette employabilité. En moyenne, les salariés restent 3,5 ans chez Cornoualia. C’est une réalité pour nous depuis 4-5 ans avec un marché de l’emploi terriblement tendu : on offre aux salariés qui nous rejoignent un faisceau d’opportunités qui leur laissent la possibilité de rejoindre une entreprise s’il y a un besoin.

 

Avez-vous mis en place de nouvelles méthodes de recrutement pour attirer ces profils ?

Nous y travaillons continuellement au sein de nos équipes. Nous avons notamment mis en place un job board, grâce au logiciel de recrutement We Recruit. Il permet notamment une diffusion étendue de nos offres sur les jobboards.

Nous pratiquons également le temps partagé. Une chargée de communication nous accompagne sur divers projets visant à développer la notoriété de Cornoualia : animation de notre site web, réseaux sociaux, communication autour de la mise en place d’actions de recrutement innovantes, et dernièrement, un spot dans les cinémas de Quimper !

À côté de cela, nous avons une démarche de communication et de sensibilisation auprès de tous les établissements de l’enseignement supérieur et des organismes de formation. Souvent, les étudiants sortant des écoles, ne connaissent pas cette manière de travailler. Toutes ces actions liées à la notoriété et au sourcing sont très importantes. Nous essayons et nous réinventons en permanence.

La moyenne d’âge chez nous est de 42 ans, avec toutes classes d’âge, que ce soit dans nos salariés ou ceux mis à disposition. Nous avons à la fois des jeunes sortis d’étude qui trouvent leur premier emploi grâce à Cornoualia, des seniors qui se trouvaient dans une impasse pour retrouver du travail, mais également des personnes qui veulent réinventer leur métier. Côté entreprise, notre rôle est aussi de les inciter à ne pas fonctionner selon des schémas établis et à avoir un regard différent sur les profils recherchés. Nous les poussons à élargir leurs sélections de candidats

 

Pousser les entreprises à élargir leurs sélections de candidats

Du côté des entreprises, comment les sensibilisez-vous à ces nouvelles formes de travail ?

Nous avons fait le choix de n’être présents que sur le Sud Finistère. Reconnue pour le soin particulier apporté à nos recrutements, Cornoualia bénéficie d’un fort engouement et le bouche-à-oreille fonctionne très bien. Nos salariés sont nos meilleurs ambassadeurs !

Pour une collaboration réussie, nous avons à cœur de travailler avec nos entreprises adhérentes sur leur besoin : bien comprendre les attendus, maîtriser l’environnement du poste et le cadre de travail. Nous insistons énormément, notamment dans nos conditions de mise à disposition, sur le fait que le salarié doit être considéré comme ses collègues. Il doit donc avoir accès aux mêmes conditions de rémunération, aux mêmes équipements… Une fois que la collaboration démarre, il y a une période d’essai. Avant la fin de celle-ci, nous réalisons systématiquement un entretien tripartite pour valider le partenariat et apporter des éléments correctifs si nécessaire.

Dans 85% des cas, le salarié travaille uniquement dans 2 entreprises. Chaque nouveau collaborateur Cornoualia bénéficie d’un suivi personnalisé par l’un des membres de l’équipe recrutement. C’est un avantage non négligeable, particulièrement dans des petites structures qui ne comportent pas de service RH.

 

Comment accompagnez-vous les dirigeants dans cette démarche de marque employeur territoriale ?

Nous facilitons les processus de recrutement, en évaluant les besoins et en sourçant les candidats, en gérant l’onboarding et l’offboarding si nécessaire, ainsi que la gestion des carrières. Depuis 2022, nous proposons également un accompagnement des conjoints dans la recherche d’emploi, et des formations mutualisées entre entreprises.

Par ailleurs, Cornoualia est un réseau d’entreprises qui permet rencontres et échanges entre dirigeants d’entreprise. Nous avons des locaux, que l’on a voulu comme des tiers-lieux pour ces acteurs. Nous mettons à leur disposition des bureaux pour recruter, ou pour leurs rendez-vous commerciaux. On leur propose aussi de participer à des réunions, des petits-déjeuners, des rencontres entre pairs. C’est aussi cela l’esprit Cornoualia !

 

Au sein de vos salariés, comment maintenez-vous cet esprit d’entreprise ?

À date, nous comptons 154 salariés à temps partagé. La culture d’entreprise chez nous passe notamment par ce suivi individuel, qui permet de fidéliser nos collaborateurs. Puis, nous organisons régulièrement des temps collectifs, des moments festifs pour partager tous ensemble. Nous réunissons également des salariés selon leurs secteurs d’activité.

Enfin, nos salariés bénéficient d’une mutuelle et d’une prévoyance que nous cofinançons, ainsi que d’un comité d’entreprise. Notre engagement financier en termes de formation représente en moyenne 3 à 5 % de la masse salariale. Le parrainage de salariés est par ailleurs récompensé.

 

Quels autres dispositifs innovants avez-vous mis en place au sein de Cornoualia ?

Notre cœur de métier reste l’emploi partagé mais Cornoualia constitue un laboratoire d’expériences. Nous amenons les entreprises à réfléchir ensemble sur des problématiques et à trouver conjointement des solutions.

Cornoualia et 5 autres entreprises (SCO Monique Ranou, EAS, Filets Bleus, Manpower et Maréval) sont à l’initiative de la mise en place de la crèche interentreprises Tôt au Tard, créée en 2006 à Quimper. L’histoire de cette crèche est fortement liée à celle du groupement d’employeurs. Plusieurs dirigeants ont évoqué autour d’une table les problèmes que rencontraient leurs salariés pour la garde de leurs enfants. Et une nouvelle fois, ces entreprises ont cherché une solution ensemble. L’an dernier, ce sont 100 enfants qui ont été accueillis à la crèche, de 5h30 à 22h30 du lundi au samedi. Cornoualia dispose d’une place réservée en permanence pour ses salariés. La crèche peut également répondre à des besoins ponctuels de garde d’enfants.

Et cette année, nous avons créé deux autres dispositifs innovants pour répondre aux besoins de recrutement sur des métiers en tension.

D’une part, l’atelier école à temps partagé permet de créer de l’emploi industriel qualifié, sur des postes de conducteur de machines. Un binôme d’entreprises accueille pendant 8 semaines des candidats, recrutés sans CV, pour les former. À l’issue, ces salariés obtiennent un CDI en temps partagé entre ces deux entreprises. La quatrième session démarre en janvier 2024.

D’autre part, nous avons créé une école de maintenance en octobre 2023, en partenariat avec l’Union des Industries et Métiers de la Métallurgie (UIMM). Les participants peuvent rejoindre notre école via un contrat d’apprentissage. Pour la première édition, neuf entreprises sont partenaires et accueillent aujourd’hui un apprenti qu’il forme au métier de technicien de maintenance industrielle.

 

Comment s’inscrit le groupement dans cette démarche territoriale ?

Cornoualia est aussi un lieu de réflexion sur les problématiques actuelles. Nous avons évoqué les difficultés liées à la famille à travers la crèche, ou encore l’emploi des conjoints. Le logement est un autre point très sensible. Je pense qu’à un moment donné, les entreprises vont devoir se confronter à cette question pour recruter plus facilement.

D’où l’importance de l’aspect territorial très présent chez nous. ll est important que les chefs d’entreprise échangent, se connaissent, partagent cet état d’esprit. La coopération fait partie de l’ADN de notre territoire. Plusieurs entreprises ont déjà eu l’habitude de réfléchir ensemble.