Interviews, Enquêtes, évènements incontournables et les actualités des adhérents d’Eurolarge Innovation… Tous les trimestres, la Bretagne Sailing Valley® News traite l’actualité économique et technologique de la voile de compétition bretonne. Aujourd’hui, nous faisons un pas de plus vers la décarbonation du transport maritime, avec la création de la société Solid Sail Mast Factory.
Le projet SolidSail vient de passer à la vitesse supérieure à travers la création de SolidSail Mast Factory, entreprise réunissant cinq acteurs phares de la Bretagne Sailing Valley auprès des Chantiers de l’Atlantique. L’objectif est de lancer une usine à Lanester pour produire en série, à partir de 2025, des mâts dotés de voiles en composite destinés aux navires de commerce et de croisière.
Solidsail Mast Factory, une aventure collective hors normes.
Équiper des paquebots et des navires de commerce d’immenses voiles rigides à soufflets de 1 200 m2, c’est le défi technologique qui occupe depuis 2016 l’ingénieur (et ancien navigateur) Nicolas Abiven, tête de pont du projet SolidSail pour les Chantiers de l’Atlantique. Ce concept de propulsion éolienne, dans un objectif de décarbonation du transport maritime, repose notamment sur le développement d’un mât autoporté en carbone de 66 mètres (pour 2 mètres de corde), inclinable pour passer sous les ponts des plus grandes villes du monde. Un défi de taille pour lequel cinq entreprises bretonnes – Multiplast, CDK Technologies, Lorima, Avel Robotics et SMM – se sont associées dans un consortium. En réalisant dans un premier temps un prototype à l’échelle 1 de 20 tonnes, qui a permis de valider techniquement le projet et qui reste visible sur le port de Saint-Nazaire. “Le deuxième palier consiste à industrialiser le processus pour baisser les coûts et les délais, à travers la création d’une usine dédiée”, explique Nicolas Abiven.
Un consortium de 6 partenaires
C’est dans cette optique qu’a été officiellement lancée fin mars SolidSail Mast Factory, société par actions simplifiée (SAS), qui réunit les six partenaires autour d’une direction collégiale, avec, à sa tête, le représentant des Chantiers de l’Atlantique. “C’est la suite logique du consortium et c’est le côté génial de ce projet de voir des concurrents historiques unir leurs forces pour faire face à des commandes d’un tel tonnage”, commente Luc Talbourdet, qui dirige Avel Robotics, associé, à parts égales avec les autres partenaires, au capital de 300 000 euros de la nouvelle entreprise. “En termes de taille, nous sommes le petit Poucet de ce collectif, mais nous arrivons avec la technologie de drapage automatisé par méthode additive”, complète ce pionnier de la robotisation du composite nautique.
“SolidSail fait la synthèse de nos trente années d’expérience commune dans le composite haut de gamme pour des pièces de grandes tailles, ajoute Yann Dollo, directeur général adjoint de CDK Technologies. La clé de la réussite de ce mécano industriel repose sur l’intelligence collective de concurrents qui partagent une culture commune de la collaboration.” Et un même objectif, ajoute-t-il, “valoriser ce que nous faisons dans la mobilité décarbonée pour en devenir des acteurs majeurs.”
Un site à Lanester
C’est à proximité immédiate des ateliers de SMM, sur le site du Rohu, à Lanester, que la nouvelle usine de 4 000 m2, dont la construction débutera l’automne prochain, verra le jour. “Un terrain était disponible, idéalement situé à la convergence des autres partenaires du projet”, indique Olivier Kerdoncuff, directeur général de SMM. “Notre challenge consiste désormais à produire sur un seul et même site des tubes pour des navires extrêmement lourds avec un taux d’utilisation important”, analyse Yann Cadart, à la tête depuis moins d’un an de Lorima.
Ce challenge fait dire à Jean-Denis Bargibant, dirigeant associé du groupe Carboman, auquel appartient Multiplast : “C’est un tour de force de se projeter ainsi pour faire de si belles pièces en série. Nous croyons beaucoup à notre attelage original, alliant performance industrielle et innovation, qui permet en outre de réduire les risques de la montée en cadence de ce marché porteur de la décarbonation, nous trouvons un réel intérêt à nous y engager de manière très concrète.”
Le marché semble en effet prometteur, puisque huit mâts ont d’ores et déjà été commandés ! Les deux premiers pour le cargo-roulier Neoline, qui fera ses premiers essais en mer en décembre 2024, les six autres pour les deux futurs paquebots de luxe à voiles Orient Express du groupe Accor, attendus en 2026 et 2027. “Ce marché exponentiel de la propulsion vélique, que nous nous efforçons de garder au maximum en France et en Bretagne Sud, concerne à 90-95% les navires commerciaux”, explique Nicolas Abiven, le nouveau président de SolidSail Mast Factory. “La première année, nous prévoyons de fabriquer six mâts, avant de passer à une cadence de dix à quinze espars par an, avec l’objectif de diviser par deux les coûts de production par rapport au prototype qui a été construit.”
Une trentaine de personnes – techniciens et ingénieurs essentiellement du fait de la robotisation poussée de la production – sont attendues dès janvier 2025 sur le site de Lanester, qui représente un investissement total d’environ 20 millions d’euros assuré par les entreprises actionnaires de SolidSail Mast Factory.
Crédit Photo : © Les Chantiers de l’Atlantique
Pour recevoir en avant-première les articles, les news, l’agenda… Inscrivez-vous à la Newsletter Bretagne Sailing Valley®